Infirmières libérales en 2025 : Exercer autrement, vivre mieux
Le métier d’IDEL évolue dans un contexte exigeant : charge de travail, vieillissement de la population, lourdeur administrative… Elles sont en première ligne, très sollicitées, indispensables pour une population de plus en plus en demande.
Le constat de leurs conditions d’exercice et de la prise en compte de leurs problématiques est alarmant. Il semble plus qu’urgent d’apporter des réponses concrètes vers une meilleure qualité de vie au travail pour les infirmières libérales.
A l’occasion de la préparation de la 11ème journée régionale des IDEL portée par l’URPS Infirmiers Centre Val de Loire, nous avons eu la chance de recueillir les témoignages de Camille Giraud (CG), chargé de communication et Pierre Charpentier (PC) président de l’URPS infirmiers Centre Val de Loire.
Ils te présentent concrètement les défis auxquels font face les IDEL, les solutions envisagées et mises en place par l’URPS Infirmiers Centre Val de Loire et surtout, toute la mission de cette journée du 2 octobre 2025.
A savoir : quel est le rôle de l’URPS ?
Un URPS (Union Régionale des Professionnels de Santé) représente, au niveau régional, une profession de santé donnée, comme les infirmières libérales.
Concrètement, l’URPS Infirmiers a plusieurs missions :
- Représentation des infirmières libérales auprès des institutions régionales (Agence Régionale de Santé, Assurance Maladie, collectivités). L’URPS est l’interlocuteur officiel pour porter la voix des infirmières sur le terrain.
- Organisation de l’offre de soins : elle participe aux réflexions sur la répartition des professionnels, les zones sous-dotées, et les projets de santé régionaux.
- Amélioration des pratiques et de la qualité des soins : l’URPS développe ou soutient des programmes de prévention, d’éducation à la santé, d’innovation en soins, et accompagne les infirmières dans les projets collectifs (ex. CPTS : Communautés Professionnelles Territoriales de Santé).
- Soutien aux infirmières : mise à disposition d’outils, de formations, d’informations réglementaires et pratiques pour mieux exercer (gestion des soins non programmés, télésanté, etc.).
- Participation aux politiques de santé régionales : l’URPS collabore avec l’ARS pour mettre en place les projets de santé publique, répondre aux crises sanitaires (comme le Covid-19), et adapter l’organisation des soins.
En résumé, l’URPS est une interface entre les infirmières libérales et les autorités régionales de santé, pour améliorer l’organisation des soins et défendre les intérêts de la profession.
Maintenant, place à l’interview.
Si tu es IDEL et que tu as envie de rebondir sur certaines choses, n’hésite pas à nous écrire en commentaire. Nos échanges sont toujours très fructueux en bonnes idées et marques de soutien pour la profession.
Constat partagé : comment vont les IDEL aujourd’hui ?
Quelles sont les principales difficultés que rencontrent les IDEL actuellement dans leur
exercice ?
CG : « Les IDEL doivent faire face à une accumulation de contraintes : une pression administrative de plus en plus lourde, des tensions territoriales liées à la répartition inégale des professionnels, une incompréhension des institutions sur la réalité de leur travail, un manque de reconnaissance de leur rôle de premier recours dans de nombreux parcours de soins. »
Qu’est-ce qui pèse le plus dans leur quotidien ?
PC : « Plusieurs éléments reviennent constamment dans leurs retours terrain :
- La charge mentale, qui ne s’arrête jamais vraiment (gestion des patients, facturation, veille réglementaire…).
- L’isolement, surtout dans les zones rurales ou périurbaines, où le sentiment d’être “seul dans la barque” est très présent.
- Et bien sûr l’épuisement physique et émotionnel, amplifié par des journées à rallonge et une exigence constante de performance et de rigueur. »
Les IDEL ont-elles, matériellement et humainement, les moyens de prendre soin d’elles-mêmes ?
PC : « La vérité, c’est que non, pas suffisamment.
Elles sont souvent les dernières à s’autoriser un temps de pause, une formation ou même un moment de partage professionnel.
Leur environnement de travail n’est pas toujours structuré pour leur offrir ces espaces. C’est aussi pour cela que cette journée régionale est importante : elle est pensée comme un moment pour elles, un temps pour souffler, se nourrir, se sentir moins seules et repartir avec des outils concrets pour mieux vivre leur métier. »
Pourquoi créer un événement comme celui-ci ?
Quel est l’objectif principal de cette journée régionale dédiée aux IDEL ?
CG : « Cette année, nous avons complètement repensé l’événement par rapport aux éditions précédentes. L’objectif est de proposer un format inédit, plus dynamique, plus ancré dans l’actualité et plus proche des préoccupations réelles des infirmiers libéraux.
2025 est une année charnière, notamment marquée par la loi infirmière : il était essentiel de créer un temps fort pour accompagner cette évolution, en donnant la parole à celles et ceux qui ont porté ce texte, au plus près du terrain.
Notre ambition est double :
- Offrir aux IDEL un espace de rencontres, d’échanges, de réflexion et de respiration dans leur quotidien souvent isolé.
- Mais aussi faire évoluer l’événement pour qu’il devienne, à terme, la référence nationale dédiée exclusivement aux infirmiers libéraux, un peu à l’image de ce qu’était le Salon Infirmier à ses débuts avant sa réorientation majoritairement hospitalière. »
Que viennent chercher les IDEL en participant à ce type de rassemblement ?
CG : « Ils viennent chercher :
- Des réponses concrètes à leurs problématiques de terrain.
- De l’information claire sur les réformes en cours (comme la loi infirmière).
- Du lien, du partage, une forme de reconnaissance collective.
- Découvrir des partenaires engagés à leurs côtés, à travers un parcours de stands pensé pour eux
- Et aussi une respiration dans leur rythme soutenu, un moment “hors cadre” où l’on parle d’eux, pour eux. C’est un événement pour eux. »
En quoi ces temps collectifs peuvent-ils répondre à leurs besoins concrets ?
PC : « Les IDEL exercent souvent en autonomie, parfois dans une forme de solitude professionnelle.
Ces temps collectifs :
- Leur permettent de se sentir appartenir à une communauté.
- Leur donnent accès à des outils, des conseils, des solutions concrètes à appliquer dès le lendemain.
- Et surtout, ils permettent de mieux comprendre les grandes évolutions en cours dans la profession, avec un éclairage direct des acteurs politiques et institutionnels impliqués. »
Comment avez-vous choisi les intervenants et les partenaires présents ? Et que viennent-ils apporter aux IDEL ?
CG : « Nous avons fait un vrai travail de sélection pour que chaque intervenant et chaque partenaire ait une valeur ajoutée claire pour les infirmiers libéraux.
Les intervenants ont été choisis pour leur engagement, leur expertise ou leur lien direct avec les grands enjeux du moment (dont la loi infirmière).
Quant aux partenaires, nous avons voulu qu’ils soient là pour accompagner les IDEL dans leur quotidien ou leur évolution pro, et non pour “occuper un stand”. L’idée, c’est de créer un événement qui fasse vraiment sens, où chaque minute passée sur place soit utile, enrichissante ou inspirante. »
Le rôle de l’URPS : accompagner, représenter, transformer
Quelles actions l’URPS met-elle en place pour améliorer la qualité de vie au travail des IDEL ?
PC : « Aujourd’hui, on ne peut plus exercer comme avant. L’isolement, la charge mentale, les évolutions réglementaires… tout pousse à repenser l’exercice libéral.
Le CREXL (Comité de Retour d’Expérience Libéral) s’inscrit pleinement dans cette dynamique : partager les erreurs
pour éviter qu’elles ne se répètent, libérer la parole, et renforcer la qualité des soins. Autour de cette logique d’entraide et de progression continue, les initiatives se multiplient : actions avec la Fédé autour de la Qualité de Vie au Travail, webinaires sur des thématiques ciblées comme la vaccination, accompagnement par SPS sur la santé mentale des soignants…
Autant de ressources précieuses à intégrer dans un exercice coordonné (CPTS, MSP…), qui devient aujourd’hui un véritable levier de transformation. Car c’est en partageant, en se soutenant et en s’organisant différemment que les professionnels pourront continuer à avancer sereinement, ensemble, autour du patient. »
Comment accompagnez-vous les IDEL dans leurs projets d’évolution ou d’innovation ?
PC : « Notre accompagnement s’inscrit dans le cadre du CPOM (Contrat Pluriannuel d’Objectifs et de Moyens) que nous avons convenu et signé avec l’Agence Régionale de Santé. Cette convention, bien qu’essentielle, limite parfois notre amplitude de
développement sur de nombreux axes d’amélioration. Le temps nécessaire à la mise en place et à la renégociation des CPOM ralentit également la mise en œuvre de certains projets. Les infirmiers libéraux ont un rôle clé à jouer dans les parcours de santé et le virage domiciliaire.
Pour les accompagner dans cette évolution, des premières initiatives ont vu le jour : incitation à valider des formations essentielles, comme celle sur les certificats de décès, avec une rémunération prévue pour les premiers volontaires, ou encore des campagnes d’information et de sensibilisation sur la montée en compétences. »
CG : « Parmi les initiatives que nous avons lancées, un projet d’accompagnement renforcé en EHPAD visant à améliorer la continuité des soins a vu le jour. Malheureusement, ce projet, pourtant prometteur et porté par notre engagement, a été stoppé prématurément.
Aujourd’hui, il est important de relancer ces dynamiques et d’offrir aux infirmiers libéraux les moyens concrets d’innover et d’agir pleinement dans l’évolution du système de soins. »
Quels sont vos grands axes de travail pour les prochaines années ?
PC : « Trois axes forts guident notre action actuelle et à venir :
- Les soins non programmés : nous développons un projet pour valoriser pleinement le rôle des IDEL dans la prise en charge rapide et pertinente des patients, en lien avec les autres acteurs de santé.
- Le tutorat et l’accueil des nouveaux installés : parce qu’un IDEL bien accompagné dès le départ, c’est un professionnel qui s’installe durablement, en confiance.
CG : « Un très gros travail de communication également depuis un peu plus d’un an :
Parce qu’une bonne communication, c’est aussi une forme de soutien, nous avons fait le choix de renforcer fortement notre service communication. Notre objectif : créer du lien, diffuser l’info utile, valoriser les initiatives de terrain et donner à chacun
les moyens d’être mieux informé, mieux outillé, mieux représenté.
Nous restructurons le nouveau site internet, pensé pour être une vraie référence pour les IDEL de la région : une bibliothèque de ressources (supports pratiques, affiches, outils de com, fiches thématiques), des replays de webinaires, une veille d’actualité professionnelle claire et à jour et des espaces pour relayer les projets innovants du territoire.
Ce travail est complété par des publications régulières sur les réseaux sociaux, des newsletters, et d’autres canaux pour vous informer là où vous êtes, sans surcharge mais avec pertinence. Nous ne sommes pas une institution lointaine : nous sommes là, à vos côtés, et à votre écoute. Notre communication, c’est aussi une manière de vous le rappeler.
Et de vous montrer, au quotidien, que vous n’êtes pas seuls dans l’évolution de votre métier. »
Un message pour les IDEL ?
Que souhaitez-vous dire à toutes celles et ceux qui exercent aujourd’hui ?
PC : « Être infirmier libéral, c’est bien plus qu’un métier. C’est être sur la route à l’aube pendant que d’autres dorment encore, gérer mille choses à la fois, les soins, les papiers, les imprévus, tout en gardant le sourire. C’est être là, au plus près des patients, dans les bons comme dans les moments plus durs. Et c’est faire tourner un cabinet… souvent seul(e), mais jamais sans conviction. Ce n’est pas simple tous les jours, on le sait. Et pourtant, vous continuez. Avec du cœur, de la rigueur, et souvent un sacré sens de la débrouille. »
CG : « Ce qu’on veut vous dire aujourd’hui, c’est qu’on vous voit. Qu’on mesure ce que vous portez, ce que vous construisez, ce que vous représentez. Et qu’il est temps qu’on vous le dise plus fort. Alors continuez à faire vivre cette profession avec autant de force, d’humanité et de liberté. Parce qu’au fond, vous êtes un pilier du système de santé. Même si on ne le dit jamais assez. »
Exercer autrement, vivre mieux le métier d’IDEL en 2025 : c’est tout l’enjeu de cette journée régionale et plus largement de l’action de l’URPS. Les infirmières libérales représentent une profession essentielle, elles sont souvent en première ligne dans la chaine de soin, et il est temps de leur donner les moyens de continuer à avancer avec sérénité, reconnaissance et soutien collectif.
Foire aux questions
Chaque région dispose de son URPS Infirmiers. Tu peux le retrouver facilement en cherchant « URPS infirmiers » suivi du nom de ta région, ou directement via le site de ton Agence Régionale de Santé (ARS) qui renvoie vers les unions régionales.
Le constat est partagé : beaucoup d’IDEL subissent encore une forte charge de travail, une lourdeur administrative et un sentiment d’isolement. Mais des initiatives voient le jour pour améliorer leur quotidien, notamment via l’URPS qui développe des actions concrètes autour de la qualité de vie au travail et du soutien à la profession.
Tu peux te rapprocher de ton URPS infirmiers, qui met en place des ressources, des formations, des événements et des projets pensés pour toi. C’est aussi un relais pour faire entendre ta voix auprès des institutions et trouver des solutions collectives. Tu peux également te rapprocher de tes collègues et d’autres professions libérales qui connaissent ton quotidien. Le maitre mot : ne pas rester seule.
L’URPS agit sur plusieurs fronts : accompagnement des nouveaux installés, prévention de l’épuisement, mise en réseau à travers les CPTS, diffusion d’outils pratiques, organisation de journées régionales et webinaires. L’objectif est de rompre l’isolement et de donner des moyens concrets pour mieux exercer.
Il suffit de s’inscrire via le site internet de l’URPS : URPS Infirmiers Centre Val de Loire L’événement est gratuit et ouvert à toutes les IDEL, avec un programme de conférences, d’ateliers et de rencontres entre pairs.
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